Le
plaisir peut être yin, doux, sensuel, subtil, passif, contemplatif, ou il peut
être yang, intense, brutal, extraverti, dominant, dynamique. L’un est apparenté
à la délicatesse féminine, et l’autre à la virilité masculine. Qu’on soit femme
ou homme, hétéro, bisexuel, ou gai, on a tous avantage à explorer la gamme du
yin et du yang et à équilibrer notre être. Notre société tend à valoriser le
yang et à dénigrer le yin, et la plupart d’entre nous ont davantage besoin
d’explorer la féminité et l’aspect yin du plaisir.
Le
plaisir pour moi, c’est un tremplin vers la spiritualité, l’illumination, l’extase…
C’est indispensable à ma survie.
J’ai
donc choisi comme complice, ma plume frémissante et délicate, pour vous inviter
à pénétrer dans mon univers intime. C’est ma plume à l’encre de cerise rouge,
qui se couche sur cette page d’histoire pour vous dévoiler les secrets de mes
plaisirs charnels.
L’interdit
du péché de la chair
Le
plaisir, m’a-t-on enseigné dans ma tendre et timide enfance, c’était l’interdit
du péché de la chair. Donc, si comme moi, vous êtes venu au monde dans la
virginité d’une bonne famille puritaine et réservée, lisez ces lignes à vos
risques. Je confesse qu’en fait, le plaisir s’est avéré un tremplin vers
l’extase et la spiritualité (même l’illumination) et un outil de transformation
personnelle indispensable à ma survie. Je suis honorée de vous confier le récit
inédit du pèlerinage de mon voyage initiatique vers le plaisir extatique.
La
peur de l’envahissement
Ma
quête est une histoire à la fois banale et périlleuse. Elle débuta dans la
prison de la tour de mon enfance, où féminité, affection, sensualité et
sexualité sont confondues, emprisonnées dans le même tabou de ma ceinture de
chasteté où parents, clergé, éducateurs et société m’ont enfermée, pour mon
propre bien. Amen. L’ère du féminisme sonna pendant mon adolescence, et
timidement, la princesse a revendiqué son émancipation sexuelle. Elle s’est
métamorphosée en femme de carrière indépendante, portant le tailleur 3 pièces
et même la cravate pour mieux se blinder. Inconsciente que mon aventure
féministe me conduisait en réalité plus vers la masculinisation que
l’émancipation, j’en ai tout de même profité pour sortir de ma tour
fragilisante et faire basculer le pendule de ma quête (mon besoin) d’équilibre
et m’enraciner dans des chaussures à talon plat, plus stables et sécures.
J’avais recyclé (troqué) ma désuète ceinture de chasteté en bouclier
protecteur, complété d’un masque à l’air hautain et invincible. Derrière se
cachait ma peur. La peur des hommes, de l’autorité, de l’abus, de l’agression,
de l’envahissement, de me faire embrasser contre mon gré, d’être consommée par
l’incontrôlable testostérone, alouette!
Merci
à la loi de la gravité et de l’équilibre qui a su ramener le pendule féministe
trop yang, dans une direction plus yin, celle de la féminité, en passant par le
centre du cœur et de l’amour de soi. Quelques prises de conscience
s’imposaient.
Me
dévoiler telle que je suis?
Ah
oui, comment puis-je attendre de l’autre qu’il m’aime, me respecte et m’honore pour
l’être authentique que je suis, si je n’ai pas appris à m’aimer moi-même et à
me présenter sans masque ni bouclier (me dévoiler telle que je suis)? Comment
peut-il me deviner et respecter mes besoins et désirs, si je n’ai pas appris à
me connaître moi-même. Comment puis-je m’abandonner en toute confiance à vivre
l’intimité, à être réceptive et accueillante, attentive et perceptive à
l’autre, si je ne me fais pas confiance à moi-même. Bien sûr, si je sais
m’écouter, me faire écouter (entendre), observer et exprimer mes désirs, je
saurai, en toute assurance, trouver et inviter un partenaire digne de partager
mes draps d’intimité.
Ah
oui, j’avais du déblayage à faire pour départager affection, sensualité, sexualité
et permettre à ma féminité de s’exprimer dans toute sa gamme vibratoire, avec
tous ses atouts sensoriels, émotifs et spirituels. Bien sûr, je devais prendre
le temps de m’initier et d’explorer les délices yin du plaisir et laisser
fleurir la geisha* en moi. Je pourrais ensuite revêtir le kimono de la
shakti**, incarner le plaisir, et inviter mon partenaire à découvrir la
complice du plaisir.
Mettez
vos récepteurs en appétit
Glissez-vous
lentement et sensuellement dans un kimono de soie et mettez en appétit tous vos
récepteurs sensoriels – vos papilles gustatives, récepteurs tactiles,
cils olfactifs, vos tympans, vos rétines oculaires – pour découvrir la
geisha en vous. Préparez-vous à la réceptivité, l’émerveillement de la
découverte des sensations dansantes et imprévisibles, dans le moment présent,
sans prendre pour acquis où vous mènera le sentier de cette expérience,
l’altitude de votre ascension, ou la latitude de votre escapade. Soyez dans
le sans attente, dans l’ouverture à ce qui est dans le moment présent. Différez
le réflexe orgasmique à l’extase de caresser chaque cellule de votre être
physique et subtil. Le plaisir est une perle précieuse. Le partager, en toute
complicité, est un privilège.
Manouche
* Au Japon, la geisha est une artiste gracieuse et sensuelle (pour tous les 5 sens)
** Dans le système tantrique, le shakti est le principe yin.