Merci, Guy Corneau! « C’est fou tout le bien que cet homme a fait. »

L’homme qui mordait dans la vie comme nul autre, ce communicateur exceptionnel et charismatique, cet homme de théâtre et conférencier de renommée internationale, Guy Corneau, est décédé le 5 janvier d’une cardiomyopathie fulminante. Après le décès au Mexique de sa sœur Joanne, la peintre Corno, il a ramené ses cendres à Chicoutimi, puis le cœur de Guy a cessé de battre.

Guy Corneau a influé sur les hommes du Québec comme Janette Bertrand, sur les femmes. Ils ont tous les deux, et parfois en complicité lors des mêmes émissions de télévision, permis d’élever le niveau de cons­cience des hommes et des femmes du Québec.

Le premier livre de Guy, publié en 1989, Père manquant, fils manqué, abordait de front des sujets tabous : pourquoi autant d’hommes étaient incapables d’exprimer leurs émotions, fuyaient l’intimité, souffraient, abandonnaient leurs études, décrochaient, se suicidaient? Au moyen de ce livre choc, il venait de rompre un lourd silence et répondait avec clarté et finesse à ces questions fondamentales. Il a enfin mis des mots sur les sentiments qui habitaient les hommes. Vingt-cinq ans après sa parution, ce best-seller international demeure profondément actuel et constitue la meilleure référence à ce jour sur la paternité et l’identité masculine. Il n’est pas étonnant qu’au lendemain de sa mort, tous les livres de Guy à la librairie du Soleil s’étaient envolés.

S’il y a quelqu’un qui nous encoura­geait à nous exprimer et à sortir de notre zone de confort, c’était bien Guy Corneau. Afin de connaître un mieux-être optimal de longue durée, Guy a créé en 1992 un groupe de cheminement et de parole, le Réseau Hommes Québec (RHQ), ainsi que le Réseau Femmes Québec. À la manière des groupes pour alco­oliques anonymes, les participants d’un groupe du RHQ ont une occasion exceptionnelle de partager leurs rêves, leurs peurs ou leur vie quotidienne, le groupe devenant ainsi un espace de soutien, un lieu de fraternité et de développement et créant une autre façon de vivre sa vie d’homme dans un nouveau rayonnement avec soi et ses proches.

Peut-être qu’un des livres de Guy Corneau vous a touché : La guérison du cœur, Le meilleur de soi ou encore Revivre, qu’il a rédigé après s’être relevé d’un cancer de stade IV l’ayant atteint à la rate, à l’estomac et aux poumons. Il était à l’article de la mort, et le corps médical ne s’explique pas qu’il soit revenu de si loin. Quelques années plustard, en 2015, le Salon du livre de l’Outaouais l’a choisi comme président d’honneur.

J’ai découvert Guy en allant assis­ter à une assemblée générale annuelle du CLSC de Gatineau au cours de laquelle il a prononcé une conférence. Par la suite, j’ai eu le bonheur et le privilège de devenir l’organisateur de près d’une dizaine de ses conférences à Gatineau entre 1996 et 2012. Ainsi, des milliers de personnes ont pu bénéficier de la sagesse de ses propos et de l’éclairage de cet homme d’exception.

Guy Corneau a créé le Réseau Hommes Québec et le Réseau Femmes Québec dans le but de donner aux hommes et aux femmes du Québec des occasions de parole et d’écoute, d’apprentissage et de croissance, d’entraide et de soutien, de réflexion et d’action qui influencent positivement leur bien-être physique, psychologique, émotionnel et spirituel.

Rentrer en soi pour mieux se dire…

Je me suis joint à un groupe de parole et de soutien du Réseau Hommes Québec (RHQ) pour la première fois il y a maintenant sept ans. Je traversais alors une période difficile de ma vie et je me sentais complètement égaré et confus. J’étais victime de crises­ d’angoisse affolantes et j’étais habité d’un sentiment d’urgence constant. Mes efforts pour reprendre ma vie en main m’ont amené à faire plusieurs lectures et à demander de l’aide. Ma psychologue m’avait suggéré la lecture du livre Père manquant fils manqué, écrit par Guy Corneau, psychanalyste et cofonda­teur du RHQ. Cette lecture a été bouleversante pour moi. À la lecture des deux phrases suivantes dans les dernières pages du livre : « La tâche des nouveaux hommes est de briser les générations de silence masculin. C’est peut-être l’acte le plus véritablement révolutionnaire que nous puissions accomplir », j’ai été inspiré d’un élan de changement qui ne s’est pas encore essoufflé à ce jour.

Malgré cet élan intérieur et la certitude de vouloir collaborer à briser le silence des hommes, j’ai vite compris­ que la tâche n’était pas simple. Loin d’être magique, ou même une simple question de volonté, il s’agit d’une démar­che d’apprentissage qui demande­ des efforts très importants. Briser le silence des hommes, c’est d’abord briser mon propre silence, sortir de mon isolement émotionnel, avoir le courage d’écouter mon ressenti et d’en parler. J’ai rapidement identifié une grande difficulté à communiquer ce que je ressentais. D’abord, tout simplement parce que je n’arrivais pas à ressentir. À la question toute simple « Comment te sens-tu? », je n’arrivais pas à répondre. Soit je ne ressentais rien, soit je n’avais aucune idée ce que représentaient mes sensations. Lorsque j’arrivais à ressentir, j’avais une grande difficulté à nommer, soit par manque de vocabu­laire, soit par peur d’être jugé, pire ridiculisé. J’avais la croyance que la peur, la peine, la colère, le besoin de reconnaissance, le besoin­ de l’autre étaient des caprices d’enfants. Une fois adulte, je devais être au-dessus de tout ça, d’autant plus que j’étais un homme.

Essentiellement, j’ai compris, à force d’écoute et d’analyse de moi-même, que j’étais paralysé par la honte. Cette honte m’amenait à m’isoler, me cacher, m’éloigner de moi-même sur le plan émotionnel. J’avais honte d’avoir besoin des autres, j’avais honte de me sentir vulnérable, j’avais honte de ne pas être à la hauteur et j’avais honte d’avoir peur. Ça été très difficile pour moi de m’avouer vulnérable alors que­ cela me plongeait dans un sentiment de honte, un sentiment que j’ai toujours cherché à éviter à tout prix. J’étais pris dans la spirale de la honte et de l’isolement.

C’est au sein d’un groupe du RHQ que j’ai trouvé un milieu favorable pour m’apprivoiser, et cela, à mon rythme. J’ai trouvé essentiel d’être accueilli sans conseil ni jugement lorsque je me dévoilais. Aujourd’hui, je suis généralement beaucoup plus en paix intérieurement. Lorsque ce n’est pas le cas, j’ai le courage de m’arrêter et de tourner le regard vers l’intérieur afin de bien sentir et comprendre ce qui se passe. J’ai développé des relations beaucoup plus authentiques, autant en amour qu’en amitié, je m’affirme plus et je suis en paix avec l’homme que je suis.

Un groupe du RHQ[1], c’est un laboratoire, un espace d’expérimentation, avec des règles qui favorisent l’inti­mité et la confiance, de même que la confidentialité, le respect et l’égalité. Le RHQ ce n’est pas de la thérapie, car les groupes ne sont pas dirigés par un intervenant. Toutefois, on dit­ souvent que la participation à un groupe a un effet thérapeutique. C’est une démarche qui demande de l’engagement et du courage, donc une certaine dose d’effort et de discipline. Croyez-moi, les bénéfices sont énormes! Je suis comptable professionnel agréé et je suis convaincu que le meilleur investissement qu’on puisse faire, c’est d’investir en soi!

1Pour obtenir des informations et/ou adhérer à un groupe en Outaouais
Ligne sans frais: 1-877-908-4545

Courriel : rhq.outaouais@gmail.com