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Reconquérir l’écrit

Contrairement à la messagerie instantanée, aux publications dans les médias sociaux et à la parole, l’écrit offre le temps de se poser, de réfléchir, de ressentir, de choisir les mots et le ton. Ce n’est pas pour rien que plusieurs thérapeutes préconisent l’écriture d’un journal et de lettres (même si elles seront brûlées ou déchiquetées). Écrire force l’auteur à s’arrêter, à ralentir sa respiration et à se placer face à lui-même. 

Devant la page blanche ou l’écran vide, comment se connecte-t-on aux mots?

D’abord, pas de stress. À moins d’écrire dans le but de remporter un Nobel de littérature, écrire se fait dans le plaisir avant tout. Il n’y a pas de compétition, pas d’urgence. Même si on se donne un échéancier ou un nombre de mots à atteindre, faisons-le pour nous motiver, pas pour ajouter une pression qui risquerait de bloquer les mots avant qu’ils atteignent notre main. 

Établir un nombre de mots ou de pages à écrire chaque jour peut nous forcer à dépasser la surface et nous amener dans des zones libératrices, en plus de créer une habitude. Le cerveau demande moins d’efforts pour se mettre en mode créatif s’il sait d’avance que c’est le moment de l’écriture. 

Si on ne sait pas quoi écrire, on écrit quand même, même si c’est seulement pour dire qu’on ne sait pas quoi écrire. Éventuellement, d’autres idées arriveront, d’autres émotions monteront. Soyons à leur écoute comme on le ferait avec un enfant qui offre un pissenlit : accueillons sans jugement, avec amour. Soyons reconnaissant pour cette partie de soi qui s’invite.

Pas de stress, non plus, pour la révision linguistique. Même si on ne corrige pas ses erreurs au fur et à mesure, elles ne se sauveront pas. Il sera toujours temps d’ajouter un S ou de trouver un synonyme pendant la relecture. La révision de la langue stimule la partie cognitive du cerveau, alors qu’on veut rester connecté à la partie instinctive pour un premier jet. 

Rien ne nous oblige à écrire de façon linéaire. Les lignes droites, de gauche à droite, c’est une convention qui ne tient pas la route quand on écrit pour soi. Même chose pour la calligraphie qui frôle la perfection. Choisissons le crayon qui nous plaît, qui glisse bien sur la feuille et laissons-nous aller aux arabesques si elles nous interpellent. Varions la grosseur des lettres, leur couleur, décorons-les si l’envie nous prend. 

Même le sens n’a plus besoin d’avoir de sens. Commencer une histoire par la fin ou écrire à partir du bas de la feuille peut apporter de nouvelles idées. Si on écrit une autobiographie, on peut y aller à rebours, en commençant par le présent et en remontant le fil des années. Même chose pour une fiction : on peut écrire les parties dans le désordre. Il sera toujours temps de réorganiser le texte si on veut préparer un livre pour l’entourage ou pour un éditeur. 

Certains ont un plan en tête (parfois, aucune écriture ne semble possible sans un plan détaillé, sinon, c’est l’angoisse totale). Donnons-nous la liberté de déroger de la structure au gré des inspirations. La structure est une béquille qui peut s’avérer utile, mais à un certain moment, il faut accepter de s’en séparer pour prendre confiance en sa plume. 

La tempête d’idées demeure un dégivreur de mots efficace. On part d’un mot, d’une expression, d’une citation ou d’une image; on trace des lignes vers d’autres termes, qui génèrent d’autres idées à leur tour. On ne bloque rien, on ne juge rien. On écrit tout ce qui nous passe par la tête en encerclant chaque terme avant de passer à l’autre. Si on hésite, on dirige le regard vers un autre mot et on poursuit notre cheminement.

Éventuellement, des mots se lieront entre eux, se répèteront. Des thèmes apparaîtront, des émotions naîtront. On pourrait se surprendre à voir jaillir le mot « joie » grâce au mot « balançoire », alors que le mot de départ était « mort ». 

On peut mettre une minuterie et se donner le défi d’écrire tant que l’alarme n’a pas sonné. On peut écrire des enchaînements de mots jusqu’à être à sec d’idées. Dans ce cas, j’encourage à continuer quelques minutes; c’est souvent à ce moment que l’émotion cachée ou les idées de génie se révèlent. 

On pourra toujours s’inspirer d’un mot ou de l’ensemble du tableau pour écrire un texte par la suite. On ne sait jamais où les mots nous mènent, laissons-les nous guider!

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