Donner un sens à sa vie

J’ai eu le privilège d’accompagner mon jeune frère de 42 ans pendant plus de trois ans et demie, et ce, jusqu’à son dernier souffle. Le temps s’arrête soudain. Nous nous mettons à nu sans réserve, et les confidences coulent à flots de part et d’autre.

Plusieurs années plus tard, la lecture du livre de Bronnie Ware, infirmière australienne en soins palliatifs, intitulé Regrets of the dying, corrobore les regrets de mon frère sur sa vie passée. Permettez-moi de vous les partager.

• J’aurais souhaité être fidèle à moi-même et non vivre en fonction des autres.
• J’aurais voulu ne pas travailler autant et voir grandir mes enfants.
• J’aurais aimé trouver le courage d’exprimer mes sentiments profonds.
• J’aurais dû garder le contact avec mes vrais amis.
• J’aurais aimé m’autoriser à être heureux.

En 2003, je m’offre un cadeau. Je donne un sens à ma vie qui bat de l’aile en devenant bénévole à la maison Mathieu Froment-Savoie (MMFS). À la suite d’une formation intense, je travaille aux soins auprès des personnes en fin de vie où les émotions sont à fleur de peau.

En 2006, le cancer frappe à ma porte. Un rappel musclé qui me force à examiner à la loupe ce qui brime ma santé psychologique et à mener une vie au plus près de mes aspirations. Je saisis enfin l’importance de la notion du plaisir et m’accorde sans culpabilité la permission de dire « non ».

Cette période de recul à titre de bénévole en soins palliatifs me permet de bondir plus haut et de retourner en poste, cette fois-ci, dans le domaine des collectes de fonds et à titre d’ambassadrice de la maison Mathieu Froment-Savoie et dans le cadre de la Campagne de charité en milieu de travail du gouvernement du Canada.

À votre tour de vous faire un cadeau : devenez bénévole à la maison Mathieu Froment-Savoie.

Voici les divers secteurs où vous pouvez être bénévole. Ces secteurs nécessitent une formation et un soutien continu :

• Accompagnement direct aux personnes en fin de vie à la MMFS
• Accompagnement direct aux personnes en fin de vie à leur domicile
• Accueil
• Administration
• Buanderie
• Couture
• Cuisine
• Décoration
• Entretien intérieur et extérieur
• Horticulture
• Collecte de fonds
• Photographie

Pour joindre notre équipe, veuillez communiquer avec la coordonnatrice des bénévoles, France Côté, au 819-770-3900, poste 225 ou par courriel à benevoles@mmfs.org.

Au plaisir de croiser votre route à la Maison où la joie est au rendez-vous.

Le dernier bain au lit avant de mourir, peau à peau, âme à âme

Vous avez déjà lavé un nouveau-né seulement avec vos mains et du savon doux? Vous avez ressenti ce contact étroit et merveilleux entre vos mains et la petite vie qui naît à peine et qui vous fait confiance. Petit être vulnérable qui se laisse bercer par l’eau et vos mains. Cette sensation de bien-être, je l’ai ressentie à nouveau, mais dans un contexte tout à l’opposé : la fin d’une vie.

J’ai été infirmière-enseignante durant plusieurs années et j’ai travaillé auprès de gens en fin de vie dans les soins palliatifs. Un matin, je me trouvais avec une étudiante préposée et elle devait donner un bain au lit complet à une dame mourante. Elle se sentait incapable de le faire toute seule, alors je l’ai accompa­gnée. Nous nous trouvions de chaque côté du lit, encadrant la dame en fin de vie. J’ai dit à la dame que nous allions la rafraîchir avec un « bain à l’éponge ». Je me suis rappelée le bain des nouveau-nés et j’ai proposé à mon étudiante de ne pas utiliser de débarbouillette, mais seulement le contact des mains, en utilisant un savon doux sans rinçage qui est spécialement conçu pour faire la toilette des personnes en fin de vie.

Nous voilà donc, entourant la dame, le bol d’eau chaude au-dessus du lit, sur la table de chevet. Lentement, j’ai commencé par mouiller mes mains dans l’eau chaude et laver doucement le visage de la dame… Ensuite, j’ai encouragé mon étudiante à se mouiller les mains, à y verser du savon liquide et à laver le bras droit, tout en douceur, avec des gestes respectueux. Je parlais à la dame, lui donnant la permission de quitter la vie sur la terre… et lentement, respectueusement, nous lavions chaque région de son corps. Ce contact étroit m’a permis de réellement ressentir cette dame plus intimement, dans toute sa vulnérabilité et son entière confiance en nous. J’ai reproduit ces gestes plusieurs fois, encore et encore, et chaque fois, je savais que je touchais l’être dans le plus pur de son cœur et de son âme.

La dernière personne que j’ai hono­rée par ce toucher, c’est ma mère. Je savais que j’allais communiquer avec son âme par ce bain thérapeutique particulier sans obstacle entre ses membres et l’eau. J’ai ressenti en moi un apaisement m’invitant à continuer de prodiguer ces gestes d’amour à ma mère. Jamais je ne pourrai confirmer que ce dernier bain d’amour aura procuré un bien-être total à la personne, mais tout ce que j’ai pu ressentir de vibrations positives et d’émotions positives me confirmera que toucher la peau avec nos mains nues procure un apaisement.

Ayant lavé ma mère, que je connais très bien, je peux avancer que j’ai touché son âme et qu’il y a eu une communication âme à âme durant le bain. C’est comme si je pouvais entrer dans sa peau et toucher un brin de son âme. J’ose ici aller plus loin dans mon expérience en y ajoutant un facteur humain. J’ai déjà assisté à une conférence de Jean Monbourquette sur les deuils, et il nous a parlé du don, celui du décédé ou du mourant. Lorsque la personne se meurt, ayons la force de lui deman­der de nous donner une de ses qualités, qu’elle pourra gentiment nous transmettre afin de perpétuer sa mémoire, et c’est ce que j’ai fait. Pendant la belle sensation de contact peau à peau avec ma mère, je lui ai demandé de me donner son sourire facile.

J’ai eu cette merveilleuse chance de laver la personne la plus importante dans ma vie, ma mère, celle qui m’a donné la vie. Ce don de moi, c’était ma façon de la remercier. Nous avons pu vivre un contact privilégié entre nos deux âmes. Je l’ai ressenti!

Je vous invite tous, si, vous avez un jour la chance d’accompagner un être cher en fin de vie, à le laver avec toute la pureté de votre âme. Vous trouverez dans les centres de soins palliatifs un savon sans rinçage. C’est beaucoup plus facile de laver sans rincer… Il suffit juste de laver et d’essuyer. Je voudrais préciser qu’au moment de laver les organes génitaux, j’ai enfilé des gants et lavé avec une débarbouillette, justement par respect. Je vous invite encore une fois à oser laver la personne chère avec la même humilité et le même amour qu’on le fait pour un petit bébé. Vous en bénéficierez tous les deux.

À fleur de peau

Je ne suis pas massothérapeute ni même titulaire d’un diplôme universitaire dans le domaine de la santé. Je ne prétends pas non plus posséder les connaissances nécessaires pour pratiquer le toucher thérapeutique, sinon qu’au moment opportun, je me situe dans le cœur.

Simple bénévole depuis 10 ans au centre de soins palliatifs La maison Mathieu-Froment-Savoie, j’ai fréquemment utilisé le toucher pour réconforter un résident ou un membre de sa famille qui me faisait des confidences. Le plus souvent, je garde le silence. Une main sur le bras ou sur l’épaule établit le contact et signifie que je suis là et que j’écoute. C’est aussi l’occasion de vivre le moment présent et de centrer son énergie en communion avec l’Autre. Dans ces moments où la vie ne tient plus qu’à un fil, où la douleur de ne plus voir l’être cher est imminente, la chaleur humaine est réconfortante de part et d’autre.

Pourquoi suis-je devenue bénévole dans le domaine des soins palliatifs?

J’ai eu le privilège d’accompagner mon jeune frère de 42 ans, homme d’affaires prospère atteint d’un cancer, plus précisément d’un lymphome non hodgkinien. Lorsqu’il m’a fait part de la mauvaise nouvelle au téléphone – je m’en souviendrai toujours – , j’ai été touchée droit au cœur. L’horloge s’est soudainement arrêtée; il avait amplement de temps libre.

Malgré son état de santé chancelant, nous avons vécu ensemble plus de trois belles années, au cours desquelles les confidences coulaient à flots et le toucher, autrefois à peine perceptible, trouvait instinctivement sa place. Dans les moments où l’oncologue posait un nouveau diagnostic, on aurait pu entendre voler une mouche; nos regards se croisaient, nos mains se rejoignaient comme si nous voulions nous accrocher à une bouée de sauvetage.

Après l’autogreffe de moelle osseuse et de multiples traitements expérimentaux au service de la science, pendant les six derniers mois de sa vie, j’ai senti l’odeur de la mort, même si, par son discours, il lui tournait le dos. J’aurais voulu lui faire part de mon chagrin, mais j’étais là, silencieuse à ses côtés, la main sur son bras, tentant peut-être de retarder son départ, ne serait-ce que de quelques mois. J’avais encore des choses à lui dire. La gorge nouée par la peine, je me suis moulée à son rythme. Cet homme-là, c’était mon frère, et il voulait vivre! Il caressait encore des projets en ébénisterie.

Faisant la navette entre Montréal et Gatineau de façon sporadique, de retour à mon domicile, mon amoureux m’attendait sur le seuil de la porte. Il me ramassait, comme on dit « à la petite cuillère ». Il m’écoutait et me serrait dans ses bras, et là, les larmes pouvaient enfin couler à flots.

Cinq ans plus tard, j’ai entendu une annonce à la radio. On recrutait des bénévoles à La maison Mathieu-Froment-Savoie. J’ai répondu d’emblée à l’appel, un peu fébrile à l’idée de croiser, au bout d’un couloir, un beau barbu à l’allure de mon frère. J’ai été emballée par la formation chevronnée offerte aux préposés aux soins bénévoles, si bien que je l’ai suivie trois années d’affilée. J’ai également pu faire la boucle sur mon deuil et saisir la place importante que j’ai occupée auprès d’un être cher en fin de vie. Ces personnes ont besoin de nous.

La maison Mathieu-Froment-Savoie a un grand besoin de bénévoles, non seulement au chevet des malades, mais dans tous les domaines.

Pour vous joindre à notre équipe, communiquez avec la coordonnatrice des bénévoles, France Côté, au 819 770-3900 ou benevoles@qc.aira.com.